Extension du domaine de l’élégance

Ma brosse à dents fait Vroum !

brosse à dent signal par Pininfarina
brosse à dent signal par Pininfarina

Ma brosse à dents est formidable. Si, si. Grâce à elle, j’ai accueilli le design buccal sous mes chicots, je suis élégant jusqu’au bout des dents. En effet, depuis 2009 le groupe Unilever, sous la marque Signal, produit rien moins que « la première brosse à dents signée Pininfarina ». Alors en voiture, mesdames et messieurs, rendez-vous au banc d’essai.

Baptisée Style-Tech, cette brosse à dents « possède une armature centrale métallique, ce qui a permis de lui dessiner un cou plus élancé. Résultat? Une brosse à dents plus longue et plus maniable qui permet un brossage plus efficace des dents du fond de la bouche ». Mouais… Résultat ? avec son long cou et sa petite tête, elle ressemble à un dinosaure du crétacé, du genre qu’on voit courir affolé pour échapper aux mâchoires de T-Rex.

Et ça marche ! une fois la petite tête entre les mâchoires d’un brave humain du XXIe siècle, force est de reconnaître le confort et l’efficacité du brossage. Qu’on n’y ait pas pensé plus tôt laisse à croire que le design des brosses à dents n’attirait jusqu’alors que le fond de cuve de la profession. A quand une brosse à dents par Ora-ïto ? En attendant, mes molaires du fond expriment par ma plume leur reconnaissance d’ivoire au fabricant. Parce qu’il paraît que les dents du fond ont deux fois plus de chances que les autres d’être cariées, ai-je appris au passage (on s’en doutait un peu).

Style-Tech existe « en quatre coloris tendance : noir, blanc, rose et bleu ». Audacieux et furieusement tendance, en effet… Bon, passons vite sur les autres fariboles de la plaquette commerciale. Il n’en demeure pas moins que le produit représente une intéressante expérience marketing, qui consiste, comme on a pu le voir dans d’autres secteurs, à poser une signature prestigieuse sur un produit banalisé. Et même plus que banalisé : quoi de plus désinvesti qu’une brosse à dents ? une éponge de cuisine, peut-être.

Pour se convaincre du potentiel d’une telle démarche marketing, une dernière couche de propagande pour la route : « La nouvelle brosse à dents Signal est unique, grâce au design exceptionnel de son auteur, Pininfarina, maître incontesté dans l’art du design métallique. Pininfarina a réussi à faire d’un objet quotidien un authentique objet d’art. Un objet élégant qui n’a plus aucune raison de se cacher mais qui, au contraire, mérite amplement sa place dans les salles de bain actuelles. Signal Style-Tech est l’unique projet de Pininfarina pour la grande distribution. »

C’est vrai, on associe plutôt le célèbre designer turinois à Vroum-vroum qu’à Scratch-scratch (cette dernière onomatopée, largement moins véhiculaire, si l’on ose dire, que la première, dit assez les contours flous de cette chronique peu glamour : scratch-scratch, cela pourrait être n’importe quoi, je ne sais pas, moi, une éponge gratounette contre une assiette sale). Mais pour ceux qui ne peuvent pas s’offrir un coupé Ferrari 250 GTO, il est possible, pour quatre euros, d’acheter une brosse à dents esthétique et fonctionnelle.

Cerise sur le gâteau (on peut y aller, maintenant qu’on ne risque plus les caries), le design de cette brosse présente même les qualités de ses défauts. Je m’explique. D’ordinaire, au bout de quatre mois de brossage environ, vous commencez à éprouver un sentiment de culpabilité, parce que vous savez très bien qu’il faut changer de brosse tous les trois mois, et que la minable économie de bout de poil que vous réalisez depuis un mois ne vous rendra même pas riche. C’est le moment que choisit immanquablement le cou du petit-dinosaure-du-crétacé pour se rompre immanquablement : le manche trop fin de la brosse se brise un beau matin en montant une fois de trop à l’assaut des molaires. Et là, vous n’avez plus le choix…

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