La musique désacralisée

Hier, j’ai dîné chez un ami :  une viande en sauce, un bon fromage, du vin, du whisky, des rires nombreux et une fin de soirée dans un lieu interlope ont tous contribué à agrémenter vivement ce moment amical. Merci Amphitryon !

gramophone

De façon amusante, à l’heure du MP3 et de Youtube, fossoyeurs du CD, ce joyeux drille a chez lui une platine et des vinyles. Ce choix est souvent l’expression d’un snobisme déplacé ou d’une nostalgie de mauvais aloi. Ici, ce n’est pas le cas.

L’idée de la musique trop disponible, qui tue la musique qu’on écoute en la banalisant n’est pas nouvelle; on trouve souvent bien des gens pour le dire.

On m’avait raconté l’histoire de Baudelaire, qui, ayant adoré un morceau qu’il avait entendu, n’eut jamais plus la chance de l’entendre à nouveau. Tout ne se donnait pas partout ni tout le temps. L’histoire est peut-être fausse, le protagoniste n’est peut-être pas le bon, qu’importe. Cette idée d’une beauté que peut-être, on ne reverra jamais pousse plus à l’attention que la perspective de tout retrouver sans peine.

3 morceaux sur une face, pas de télécommande, le crépitement du commencement, qui ouvre le bal comme un rideau qui se lèverait pour faire taire ceux qui parlent encore… A la manière d’un concert, qu’on savoure plus pour l’avoir plus désiré qu’une piste négligemment lancée sur un ipod, un morceau qu’on lance vraiment s’écoute plus profondément. 1000 chansons qu’on peut chantonner contre un CD qu’on connaitrait vraiment. C’est une affaire de choix.

L’écoute est exigeante : des paroles, une mélodie, leur mariage…on peut bien sûr écouter Bach en pelant des carottes ou Ferrat en cirant ses chaussures, mais on en tire sans doute pas tout.

Je ne fais ici ni l’apologie mélancolique du 33 tours, ni le procès intransigeant de la musique de fond, mais je souligne simplement, car il est parfois bon de se l’entendre rappeler, que l’abondance lisse les saveurs et que la boulimie de l’écoute se fait facilement au préjudice de sa qualité.

Perdre ces moments, c’est passer à côté d’un plaisir et risquer de s’user l’oreille sur des morceaux qui pourtant valaient un tête à tête !

Une réponse à “La musique désacralisée

  1. Malgré la domination du CD, du DVD et du Blu-Ray, il reste de nombreux irréductibles partisans du vinyle. Pour comprendre, il suffit d’écouter ne serait-ce qu’une seule fois sa douce et chaude sonorité, idéalement amplifiée par un amplificateur à lampes…

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