Bel y Cia, Barcelona

Nul ne saurait dire à coup sûr si Barcelone restera espagnole dans les années qui viennent, ou deviendra exclusivement catalane, mais une chose semble acquise : Bel restera Bel. Derrière ce truisme assumé, voici un bref retour d’expérience, à l’issue d’un séjour dans la capitale catalane au début de l’automne. Rien à voir avec l’actualité politique, un salon professionnel m’avait condamné à cette forme de tourisme frustrant à quoi ressemble souvent un séjour professionnel dans une ville qu’on ne connaît pas (je m’étais déjà rendu à Barcelone dans des conditions similaires il y a quelques années, ce qui ne me permettait pas de revendiquer une grande familiarité avec la ville).

Un reflet du soleil de Barcelone sur un coin d'élégance sous verre
Un reflet du soleil de Barcelone sur un coin d’élégance sous verre

 

J’avais tout de même réservé quelques heures matinales pour une découverte à pied du centre ville, et demandé par avance des conseils à l’un de mes frères sur les commerces de luxe qui pouvaient y valoir la halte. C’est ainsi que je me trouvai en fin de matinée devant le numéro 20 du Passeig de Gràcia, dans une large artère qui ne sentait pas la guerre civile, en dépit de la presse alarmiste de l’autre côté des Pyrénées. Et je me disais devant cette boutique : La guerre civile, vous la déclenchez quand vous voulez, mais pas aujourd’hui !

En fait de boutique, il conviendrait d’en parler au pluriel, car les boutiques hommes et femmes sont distinctes… Catalogne, Arabie saoudite, même combat ? Je me concentrai sur la première, on ne peut pas être partout, et y pénétrai bientôt, aimanté par de jolis vêtements aperçus en vitrine.

 

L’intérieur de la boutique ressemble à cette vitrine : plutôt dans la profondeur que dans la largeur, plutôt vin de Bourgogne que de Bordeaux, les œnophiles verront ce que je veux dire, les autres se dépêcheront de devenir des œnophiles. Pas d’esbroufe ici, le décor doit prévenir que l’entreprise recherche la qualité plutôt que le spectaculaire dans le choix des produits qu’elle distribue ou fait fabriquer sous son nom. Il est révélateur à cet égard qu’Edward Green soit le seul fabricant de chaussures distribué : Bel y Cia fait plus penser à un club britannique qu’à une arène espagnole.

Donc les amateurs parisiens d’une boutique comme Charvet et autres nostalgiques d’Old England sur le boulevard des Capucines seront enthousiasmés par Bel y Cia. Pas au point de faire des moulinets avec leur écharpe en cachemire, ce n’est pas le genre de la maison, disons qu’ils iront jusqu’à un murmure approbateur : Joli travail.

Comme chez Charvet, on vend ici, et probablement nulle part ailleurs, une Eau de Cologne maison bien élevée. Il est vrai que Bel y Cia peut se définir d’abord, à l’image de Charvet, comme un haberdasher, terme anglais difficilement traduisible, qui recouvre le commerce d’un large éventail de produits pour hommes, accessoires de mode, produits de toilette, sous-vêtements à une époque où la chemise appartenait à cette catégorie-là, etc. La création de Bel y Cia, en 1842, par la veuve d’un immigré d’origine française, est d’ailleurs contemporaine de celle de la célèbre maison de la place Vendôme.

Un exemple du style pour homme de Bel y Cia
Un exemple du style pour homme de Bel y Cia

Au rayon chemises en prêt-à-porter, puisqu’on parle d’un autre chemisier, le col button down se porte bien : pied de col assez haut, tombé très ample, le col roule superbement, et les cotons sont magnifiques. Seule la taille des cols laisse perplexe : j’examine une chemise disponible en 39, j’explique au vendeur que je fais un petit 37 continental, 14,5 anglais, et il me répond avec assurance : Oui, Sir, c’est du 39, c’est votre taille. Peut-être les Catalans, outre une langue distincte du reste de l’Espagne, ont-ils aussi conservé un système de mesure vernaculaire.

En marge des modèles de chemises classiques, Bel y Cia propose un modèle sans bouton de col, échancré jusqu’au premier bouton de la chemise, d’une décontraction amidonnée, la seule faute de goût que j’ai notée dans la production maison. Le personnel essaie sans grande conviction de pousser cette liquette dans le panier du chaland, dans l’espoir peut-être de la faire disparaître de sa vue. Il a du mérite, ce personnel, car les horaires d’ouverture sont moins victoriens que l’ambiance de club anglais de la boutique : 09h30-20h00, c’est le touriste qui va être heureux !

 

Non loin des chemises, l’une des autres spécialités de la maison est la veste Teba, cette veste espagnoles typique, veste de chasse à l’origine, que propose également Artumès & Co à Paris, rue du faubourg Saint Honoré. Il s’agit d’une veste légère déstructurée, avec des emmanchures larges, une poche poitrine des revers sans cran et des poignets de type chemise. Well, not my cup of tea, really, mais de la belle ouvrage pour les amateurs et suiveurs de ce style lancé dans les années 1930-1940, avec rien de moins que le roi Alphonse XIII dans le rôle du héraut.

Au rayon lunettes solaires, la ligne maison du moment est une très élégante déclinaison pantoscopique. Où l’on constate que même les accessoires les plus éloignés du cœur de la production maison ont droit à un traitement soigné. Le lecteur l’aura compris : s’il passe par Barcelone, quelle que soit la couleur des drapeaux, une visite chez Bel y Cia s’impose.

 

 

 

Quelques renseignements pratiques

Adresse: Passeig de Gràcia 20, Barcelona

Horaires d’ouverture:

Homme: Du lundi au Samedi: 9:30 – 20:00

Femme: Du lundi au Samedi: 10:00 – 20:00

Téléphone: +34 933 015 347

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