Du côté de chez Stéphane

C’est une place charmante, un petit morceau de carte postale collé sur le quartier des Batignolles. On s’y croirait en province, comme souvent à Paris quand le lieu demeure ignoré des touristes et loin des quartiers de bureaux. Il y a des arbres, il y a l’église, la boulangerie, le café. Et il y a Stéphane.

Stephane, place du docteur Félix Lobligeois à Paris

Ceux qui ne connaissent pas encore cette boutique du XVIIe arrondissement devront sans doute prendre leur plan de Paris pour la trouver : la Place du docteur Félix Lobligeois n’est pas de celles qu’on traverse souvent, à moins de compter au nombre des fidèles de l’église Sainte Marie des Batignolles. Ou, déjà, des fidèles de la chapelle Saint Stéphane des beaux souliers, dans laquelle on peut se recueillir devant ce que l’artisanat a produit de plus élégant au service de la mode masculine ces dernières décennies.

Car Stéphane vend surtout du second hand, impeccable, trié sur le volet, avec une prédilection affichée pour les souliers de la meilleure facture. Encore le mot « vendre » semble-t-il peu approprié : l’hôte des lieux est moins un commerçant qu’un passeur, et il pousse la courtoisie jusqu’à faire acheter plutôt qu’à vendre.

Et ce ne sont pas seulement ses beaux produits patinés par le temps, sélectionnés avec une exigence sourcilleuse, que ses visiteurs viennent trouver ici. Ils viennent aussi trouver une mémoire vivante de l’élégance masculine, une passion pour le mariage du bon goût et de la belle ouvrage que Stéphane distille dans la conversation entre deux patines, avec son air de bonze redescendu par erreur en plein Paris de sa lévitation, les yeux plissés, le sourire doux.
C’est un plaisir de le voir prendre telle écharpe imprimée comme-on-n’en-fait-plus, et montrer en un tournemain comment et pourquoi elle tombe mieux que ses équivalents modernes ; sortir un carton d’une étagère, et découvrir des nœuds papillons de la maison Charvet.

La vitrine de Stephane

Ici, le terme de vintage prend tout son sens. La dernière fois que je suis passé chez Stéphane, il m’a montré un pantalon de velours banane sorti de chez Camps en 1964, comme neuf, ou plutôt mieux que neuf, et d’un coton qu’on ne retrouverait plus aujourd’hui. Je me souviens encore d’un pardessus en Donegal tweed qui montrait que Burberry’s, dans les années 1980, restait au sommet du prêt-à-porter. Ou encore d’une série de costumes réalisés pour le même client par un tailleur florentin aujourd’hui oublié. La ligne d’épaule, le montage des têtes de manches touchaient au sublime, dans la veine de ce qu’un Jean Gabin portait à l’écran dans les années 1950.

Précisons tout de même, pour le visiteur qui ne trouverait pas sa taille ou son bonheur (hypothèse nettement moins probable) dans le choix second hand, que Stéphane propose aussi quelques lignes de vêtements qu’il fait réaliser, toujours avec la même exigence. Et puis, qui sait ? si votre tête lui revient, peut-être acceptera-t-il de réaliser pour vous une paire de souliers.

7 réponses à “Du côté de chez Stéphane

  1. Bonjour,

    Merci, c’est un très bon tuyau. J’y penserai lorsque mes pas m’emporteront dans le quartier.

    Cordialement,

    Andrei Caudray

  2. Nous comptions aussi mettre en avant Stéphane! Bravo à vous!

    A noter qu’il est le frère de Rachid, excellent cordonnier situé rue Boursault, à 30 secondes de la boutique de son frère.

    Amicalement,

    Virgile de FTDF

  3. Et Stéphane,mesdames et messieurs,c’est mon grand père !
    Un homme que j’admire énormément et qui est un professionnel hors paire . Un homme distingué et toujours au petits soin pour ses clients !

    J’ai 18 ans et contrairement aux préjugés,sa boutique est pour nous (jeunes de mon âge) comme une page de l’histoire,une tendance élégante,solide puis ce qu’elle est toujours d’actualité !
    N’hésiter pas,c’est une visite à faire .

  4. A, oui, ce cher Stephane. J’allais regulierement lui rendre visite, juste pour flaner et surtout me delecter de sa conversation avisee. J’habite desormais a Londres, mais je pense souvent a lui et espere le revoir un jour, pour qu’il voit comme j’ai bien grandi! Effectivement, Stephane est ce genre de personne qui fait figure de mentor, car son amour des belles choses deteint sur ceux qui aiment ecouter les belles histoires.

    Luna, vous avez beaucoup de chance avec votre grand-pere. Envoyez-lui toute mon estime quand vous les verrez.

    Son frere coordonnier est aussi une tres bonne reference et il me tarde de trouver un remplacant a Londres…

  5. Moi aussi j allais chez Stephane jusque ds les annees 2000. Retraite et crise aidant je ne vais plus souvent a Paris. Il me reste encore quelques belles vestes des gilets (ds lesquels je ne rentre plus) et une collection de foulards introuvables aujourd hui, sans oublier la saharienne de Clark. Mais le souvenir qui me reste est le plaisir que j ai pu trouver a me rendre chez lui. Ns aurions pu y passer des journees. Un charme
    fantastique. Dites lui le colonel et sa femme vs saluent.
    Je pense qu il se souviendra.

  6. Nouvelles du front : Stéphane était très en forme, et d’une grande élégance ! jeudi dernier où je le rencontrai par hasard à l’occasion d’un cocktail donné dans les salons du Cercle de l’Union interalliée, à Paris. Honte sur moi, j’ai complètement oublié de lui transmettre ces salutations, mon colonel (ceci en réponse au dernier commentaire), ce sera pour la prochaine visite, Place du docteur Félix Lobligeois…

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