Si le sujet de l’élégance nous pousse le plus souvent à parler de vêtements et de mode, nous ne pouvions pas sérieusement parler d’élégance sans rendre un hommage à celui qui fût sans doute le plus élégant des pianistes.
Arturo Benedetti Michelangeli. Ce nom majestueux donne le ton du personnage.
Du flegme à rendre un anglais fou, de l’élégance plus que quiconque, toute la précision d’un orfèvre, et pourtant toute la délicatesse d’un poète.
Sa technique parfaite continue de fasciner même les plus grands pianistes : pas une fausse note à son actif. Arturo n’est pas de ceux que le piano effraie : la technique domptée faisait de lui un fauve féroce ou une hirondelle dans l’éther. Il donnait l’impression de la maîtrise souple et de l’aisance instinctive. C’était un dompteur en grande tenue, un honnête homme qui faisait danser les mélodies ou hurlait avec passion sans perdre son sang froid.
Son élégance était totale. Coiffé comme une gravure de mode, un petite moustache biseautée et une queue de pie irréprochable : Lang lang est ses frusques adolescentes ont des leçons à prendre.
Comme tous les grands caractères, il était habité par des traits contradictoires qui faisaient tout son intérêt. Rare en public, prompt à répandre des rumeurs à son sujet, fantasque comme le sont les divas, il ne se produisant qu’avec l’assurance d’être au sommet de son art. Ainsi, il pouvait arrêter un concert s’il jugeait que le piano n’était pas au niveau ou qu’il n’était pas en doigt : on ne compromet pas un chef d’œuvre.
Passionné dans son jeu, ses interprétations ont, selon son humeur, la noirceur du désespoir ou la fraîcheur de la rosée, la légèreté de la bise ou le poids oppressant de l’orage.
Découvrez-le dans Scarlatti, écoutez-le dans Beethoven et regardez sans vous lassez le jeu aristocratique de ce dextre rêveur.
Coureur automobile passionné, concertiste sans failles, maître de lui et de ses œuvres…
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